Appel aux Maires de France

Reporterre, 25 novembre 2020 / Catherine-Émeline Robillard et Corinne Morel-Darleux

Pour la biodiversité et les paysages, maires de France, plantez des arbres fruitiers

En 1980, le navigateur Bernard Moitessier publiait une lettre ouverte pour inciter tous les maires de France à planter des arbres fruitiers dans leur commune. Quarante ans plus tard, le 25 novembre, les autrices de cette tribune renouvellent cette demande et s’interrogent : et si c’était sous un arbre que commençait une humanité réconciliée?

En 1980, le navigateur et écrivain Bernard Moitessier encourageait les maires à planter des arbres dans leurs communes. Quarante ans plus tard, l’initiative revit sous le label Communes à croquer. L’animatrice de cette opération, Catherine-Émeline Robillard, ainsi que Corinne Morel-Darleux, militante écosocialiste, autrice de Plutôt couler en beauté que flotter sans grâce et chroniqueuse régulière de Reporterre, sont les autrices de cette nouvelle «Lettre à tou-te-s les maires de France» et dont la liste des signataires et à retrouver à la fin du texte.


L’année 2020 marque les quarante ans de la proposition faite par le navigateur Bernard Moitessier à tous les maires de France de planter des arbres fruitiers dans leurs communes. En ce 25 novembre, puisque selon le dicton populaire : «À la Sainte-Catherine, tout bois prend racine», nous appelons à notre tour les maires de France à planter «ces arbres fruitiers qui appartiendraient à nous tous (y compris aux oiseaux et aux abeilles) et qui pourraient devenir, en grandissant, une œuvre généreuse et simple, qui aiderait à unir les hommes.»

En l’espace de quarante ans, le dérèglement climatique, la perte faramineuse de biodiversité mais aussi d’esthétique, nous ont amenés à questionner notre rapport au monde, aux notions de subsistance et de communs. Les canicules répétées nous rappellent que l’ombre peut devenir vitale, et les derniers rapports alarmants sur la biodiversité nous intiment de nous replacer au sein du même écosystème et de laisser de la place au vivant. La crise du Covid-19, et l’isolement qu’elle a provoqué, nous ont fait profondément ressentir le besoin de lien aux autres et à la nature, tout comme le besoin de beau, de fleurs qui s’épanouissent et d’oiseaux qui pépient. Elle a aussi renforcé notre souci social devant les risques accrus qu’elle a fait peser sur les plus vulnérables, et notre conscience de l’importance d’une certaine autonomie alimentaire.

La mairie de Lachelle a été la première commune à avoir répondu à l’appel des communes à croquer, en 1980. Elle avait planté des arbres tout le long de la route menant au village.

L’arbre nourricier contribue à tout cela à la fois, sans coûts astronomiques ni acrobaties technologiques : refuge de biodiversité, beauté des paysages, fruits et fourrage, ombre, atténuation des températures, stockage de carbone, captation des eaux de pluie et stabilisation des sols, amélioration de la qualité de l’air, hausse des rendements en agroforesterie, et même baisse de la tension artérielle et du stress. Planté dans les espaces publics, l’arbre fruitier leur redonne tout leur rôle : celui de lieux de sociabilité, de terres d’hospitalité, d’accueil et de partage. Qui mieux que lui, ses branches grandes ouvertes, ses fruits tendus, pour revaloriser ces espaces communs?

En regagnant le cœur de nos bourgs et de nos villes, ou en haies dans nos bocages, l’arbre reprend sa place centrale dans les imaginaires et nous redonne envie de le protéger. Il retisse la toile du vivant, trop longtemps séparée entre la nature, d’une part, et l’être humain, de l’autre. Et si c’était sous un arbre, sous son feuillage, à contempler oiseaux et insectes, le nez dans ses fleurs, ses fruits en bouche, que commençait une humanité réconciliée? Réenchanter la ville, arborer la campagne, créer des archipels de vie… Aujourd’hui plus que jamais nous avons besoin d’utopies et d’imaginaire, de pas de côté et de bouffées d’air, de renforts, de victoires, de bon sens et de simplicité.

Un poirier planté au Bono (Morbihan) en mémoire de Bernard Moitessier qui y est enterré.

Dans le sillage de Bernard Moitessier, partout en France, depuis quarante ans, des maires, des associations, des citoyen-nes conscients des défis écologiques, esthètes ou simples gourmands, plantent des arbres fruitiers. La suite ne peut s’écrire que collectivement et nous invitons chacun, et particulièrement les équipes municipales tout juste élues, à faire s’épanouir ces fruits de la convivialité et à partager leurs expériences afin de multiplier les «communes à croquer».

Quant à nous, nous continuerons à y contribuer en mettant à disposition des outils techniques, en conseillant et en orientant les communes, en favorisant la mise en lien vers des acteurs spécialisés, en relayant les réussites et les bonnes pratiques.

Avec nous, en lucidité, responsabilité et souci de la beauté du monde, soyez les artisanes et les artisans de cette belle idée.


Les signataires de la lettre

  • Catherine-Émeline Robillard, Animatrice Communes à croquer (www.communesacroquer.fr )
  • Corinne Morel Darleux, Autrice de «Plutôt couler en beauté que flotter sans grâce» (Libertalia) et conseillère régionale Auvergne-Rhône-Alpes – Rassemblement citoyen écologiste solidaire
  • Isabelle Assih, Maire de Quimper
  • Pierre Athanaze, vice-président à la biodiversité et à la prévention des risques de la métropole de Lyon
  • Philippe Audebert, maire de La Frette-sur-Seine
  • Claude Aufort, maire de Trignac
  • Benjamin Badouard, co-président du groupe Les Écologistes à la Métropole de Lyon
  • Delphine Batho, députée des Deux-Sèvres
  • Stéphane Baudry, maire de Saint-Maixent-l’École
  • Stéphane Beaupoux, troisième adjoint à la mairie de Clavette délégué aux espaces verts, à l’embellissement et à la transition écologique
  • Bizi!
  • Jean-Marie Boivin, Riec-sur-Belon
  • Catherine Bouev, citoyenne Paris
  • Patricia Bourget, adjointe aux espaces verts à la mairie de Saint-Germain-sur-Ille
  • Café culturel associatif C’est déjà ça, Saâcy-sur-Marne
  • Céline et Olivier pour l’association Cap-Heol
  • Jean-François Caron, maire de Loos en Gohelle
  • Florence Cerbai, conseillère régionale écologiste de l’Ardèche – Rassemblement citoyen écologiste solidaire
  • Gautier Chapuis, conseiller délégué au Maire de Lyon à l’alimentation locale et à la sécurité alimentaire
  • Bénédicte Ciolfi, bibliothécaire retraitée, Paris
  • Confédération paysanne
  • Monique Cosson, conseillère régionale Auvergne-Rhône Alpes – Rassemblement citoyen écologiste solidaire
  • Francis Courteaux, Sarzeau
  • Thomas Coutrot, économiste
  • Stéphane Cuttaïa, coordinateur Gilets Verts
  • Xavier de Catheu, président de l’association Terre et Lettres et Sylvie de Miramon
  • Isabelle Dalban, citoyenne
  • Sophie Delhôme, maire de Piseux
  • Vincent Delmas, porte-parole de la Confédération paysanne de la Drôme
  • Colette Dinahet pour Fibr’Ethik, structure d’insertion par l’activité économique
  • Thomas Dossus, sénateur écologiste du Rhône
  • Grégory Doucet, Maire de Lyon
  • Guillaume Dozier, cofondateur de Les Pionniers
  • Fanny Dubot, maire du 7e arrondissement de Lyon, conseillère métropolitaine
  • Véronique du Manoir, amie de Bernard Moitessier
  • Estuairez-vous, association pour la conservation de l’estuaire de la Loire et son littoral à Saint-Nazaire
  • Romain Evrard, Adjoint au maire d’Annonay en charge de la transition écologique et du développement durable
  • Jean-François Fountaine, Maire de La Rochelle
  • France Nature Environnement Auvergne Rhône Alpes
  • Olivier Gaucheron, maire de Verdigny
  • Isabelle Girard, citoyenne
  • Nicolas Girod, porte-parole national de la Confédération paysanne
  • Guillaume Gontard, sénateur de l’Isère
  • Fabienne Grebert, conseillère régionale de Haute-Savoie – Rassemblement citoyen écologiste solidaire
  • Alan Guillou, responsable Les Planteurs volontaires
  • Valérie Huet-Morinière, adjointe à la Mairie de Quimper chargée de la végétalisation
  • Nicolas Husson, adjoint au Maire de Lyon  à la Biodiversité, Nature en Ville, Protection animale
  • Didier Jeanjean, maire adjoint à la mairie de Bordeaux chargé de la Nature en ville et des quartiers apaisés
  • Isabelle Joucan, maire de Guipel
  • Gaëlle Kéddidèche, cheffe de projet régie de quartiers Montauban Services
  • Marie-Jeanne Krafft, citoyenne
  • Edmée Laporte, Morbihan
  • Marie-Véronique et Jacques Laurent, Habitants de Le Bono
  • Bertrand Legendre, maire de Saint-Germain-sur-Ille
  • François Légnier, Maire de Mareuil-sur-Arnon, Vice-président de la Communauté de Communes de Fercher pays florentais
  • Caroline Le Pape, Nantes
  • Les Ami.e.s de la Confédération paysanne
  • Les Amis de la Terre
  • Les Amis de la Terre Val de Bièvre
  • Marien Lovichi, adjoint Parcs, Combes et Jardins à la mairie de Dijon
  • Yvan Lubraneski, Maire de Les Molières
  • Valentin Lungenstrass, adjoint au maire de Lyon chargé des Mobilités, de la Logistique urbaine et des Espaces publics et conseiller de la Métropole de Lyon
  • Boris Marcel, directeur & cofondateur Les Cols verts
  • Émilie Marche, conseillère régionale Auvergne Rhône Alpes – Rassemblement citoyen écologiste solidaire
  • Marie Margaux, chargée de développement pour Voilenat.org
  • Bernard Mayer, Nantes
  • Olivier Merbau, auteur, traducteur, navigateur et explorateur, Expédition Escondida et Voilenat.org
  • Morgane Moinier et Nicolas Marie Agnès, La Feuillée
  • Fatima Parret, conseillère régionale Auvergne-Rhône-Alpes – Rassemblement citoyen écologiste solidaire
  • Véronique Lerebours, compagne de Bernard Moitessier
  • Mathilde Panot, députée du Val-de-Marne
  • Participe Futur et son voilier Alcyon, représentée par son président Jacques Landron
  • Éric Piolle, maire de Grenoble
  • Victor Provôt, maire de Thiron-Gardais
  • Loïc Prud’homme, député de la Gironde
  • Laura Raimondeau, biologiste marine et éducatrice en environnement
  • Christophe Ranger, vice-président Culture & Patrimoine du Yacht-Club classique de la Rochelle, ancien membre de l’équipe de skippers de Joshua aux Amis du musée maritime
  • Laurent Riche, maire de Kingersheim
  • Isabelle Robert, chargée de projet lien social-développement durable, régie des quartiers Joué-lès-Tours
  • Jean-Marc Sémoulin, président PTCE Vivre Les Mureaux
  • Clément Sénéchal, chargé de campagne à Greenpeace
  • Terre et Lettres, association de La Rochelle
  • Francis Tolan, navigateur de la Longue Route 2018 pour la recherche contre le cancer
  • Véronique Tomietto, citoyenne voyageuse, Indre
  • Bruno Tréca, photographe vidéaste, Les Rencontres nautiques de Bruno
  • Hugo Verlomme, écrivain de la mer, journaliste, ami de Bernard Moitessier
  • Voilenat.org, association organisatrice de l’expédition Escondida
  • Ethan Welty, directeur de Falling fruit

Communes à croquer

En 1980, Bernard Moitessier, grand navigateur et écrivain, proposait à tous les maires de France de planter dans les espaces publics de leurs communes : « ces arbres fruitiers qui appartiendraient à nous tous (y compris aux oiseaux et aux abeilles) pourraient devenir, en grandissant, une œuvre généreuse et simple, qui aiderait à unir les hommes ». 40 ans plus tard, il était temps que cette belle idée retrouve une seconde jeunesse, pour que l’arbre nourricier, qui appartient à tous et dont tous nous sommes responsables, regagne nos centres-bourgs et nos centres-villes, et peu à peu notre imaginaire collectif.

Cette initiative vise à semer des graines partout où elles n’auraient pas encore fructifié. Mais les graines ont besoin d’un terreau fertile où s’épanouir, et cette idée aura besoin de la participation de chacun, dans sa commune, pour se réaliser. Alors qui que vous soyez, citoyen, maire, groupement de citoyens, association… n’hésitez pas à apporter votre feuille à la canopée !

Quant à ce site, il se veut une boîte à outils à destination de quiconque souhaite ramener dans ces espaces de vie communs, du comestible, soit de la vie, et de l’arboré, qui crée les conditions chaleureuses de la vie en commun. Une boîte à outils pour permettre à chaque commune, quelque soit sa taille ou ses fonds, de planter des arbres fruitiers si elle le souhaite. Et à chacun d’entre vous de veiller à ce que la graine porte ses fruits !


Une histoire d’amour

Si en 1980, l’idée de Bernard Moitessier de planter des arbres fruitiers dans les espaces publiques semblait aussi folle que celle de ne pas passer la ligne d’arrivée après son tour du monde mais de continuer aussi loin que son bateau le porterait, quarante ans plus tard, c’est au contraire une idée qui a fait son chemin.

Mais alors que la plantation d’arbres fait de plus en plus l’unanimité, en particulier pour lutter contre le réchauffement climatique, on tend à voir dans la reforestation une nécessité, une obligation vitale, bref, rien de très marrant. Les compensations carbone viennent calculer le nombre d’arbres qu’il faudrait planter, et quelles espèces seront les plus rapides à répondre à cette nécessité. Avec tout cela, on en arriverait presque à oublier que les arbres sont beaux, et que les fruits sont savoureux…

En 1980, lorsque Bernard Moitessier lance son appel aux maires de France, il a déjà conscience de tous les bienfaits des arbres, en ayant lui même planté de nombreux pour se garantir un peu d’ombre et un sol riche où cultiver ses légumes. Pourtant, ce n’est pas de cela qu’il nous parle, mais de la vision enchanteresse d’un pays parsemé d’arbres fruitiers.

Pourquoi ne pas prendre les choses à l’envers? Ou serait-ce l’endroit? Et si l’on plantait les arbres que l’on trouve les plus beaux, et dont on aime le plus les fruits? Tous les arbres absorbent du carbone au bout d’un certain temps, mais seuls les arbres que l’on chérit durent.

Ce site part de l’idée que l’on peut planter des arbres par plaisir: pour pouvoir se promener sous un feuillage tout vert, marcher sur un tapis de fleurs juste tombées, tendre le bras pour attraper son goûter, se repaître des formes emmêlées des branches en hiver, construire des cabanes et tout autre petit bonheur que vous inspirent les arbres. C’est aussi la conviction qu’il n’y a pas de meilleure façon de protéger les forêts que d’aimer leurs habitants, et on ne force pas l’amour.

Finalement, l’objectif est bien plus de multiplier les coups de foudre que de multiplier les plantations, car enfin, ne dit-on pas que quand l’on aime on ne compte pas? Alors n’hésitez pas à tomber amoureux et à planter à la mesure de cet amour!


À propos du label

Comment devient-on une Commune à croquer?

En plantant des arbres fruitiers dont les fruits seront accessibles à tous, tout simplement!

Votre commune a déjà de nombreux arbres fruitiers qui régalent ses habitants, les personnes de passage, et les animaux et insectes des environs? Alors vous êtes déjà une commune à croquer!

N’hésitez pas à nous dire tout ce que vous faites déjà grâce au formulaire ci-dessous, et nous ajouterons votre commune à la liste des Communes à croquer!


La carte

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